Découvrez la région avant le vin : petite histoire de la scène viticole du Languedoc-Roussillon
- Anastasia Beer

- 13 juil.
- 4 min de lecture
Le saviez-vous ? Le Languedoc-Roussillon abriterait le tout premier vin blanc effervescent jamais répertorié et peut-être même l’inspiration du Champagne lui-même ! La légende raconte que Dom Pérignon serait passé par Limoux (là où l’on produit la Blanquette de Limoux, ces bulles raffinées élaborées par les moines de l’abbaye de Saint-Hilaire dès 1531) en route vers l’Espagne. Une coïncidence ?.. Peut-être mais une coïncidence stylée!
De la Méditerrannée aux pieds des Pyrénées
Ce qui rend la région viticole du Languedoc‑Roussillon si exceptionnelle, c’est sa grande diversité et sa complexité. Tout au long de la Méditerranée, depuis Nîmes, elle se pare de paysages saisissants : la nature sauvage des Cévennes, les teintes rougeoyantes du Salagou, les collines ondulantes du Minervois, jusqu’aux contreforts des Pyrénées qui marquent la frontière avec notre voisin espagnol.

N'oublions pas le Roussillon
On parle souvent du « Languedoc » pour désigner les vins de la région, mais n’oublions pas son petit frère du sud, niché contre les Pyrénées : le Roussillon. Même si leurs histoires sont étroitement liées et qu’on les regroupe généralement sous un même nom en France, ces deux régions sont culturellement et stylistiquement bien différentes.
Le Roussillon possède une identité résolument catalane, héritée de sa proximité avec la Catalogne, et ses vins sont tout aussi singuliers, notamment grâce à ses célèbres Vins Doux Naturels (ou VDN pour les intimes), ces vins fortifiés naturellement sucrés. Ils mériteraient d’ailleurs un article à part entière.
Routes romaines et traditions monastiques
Comme la plupart des régions viticoles françaises, l'histoire de la scène viticole du Languedoc-Roussillon a des racines très anciennes avec nos amis les Grecs en passant par les Étrusques, et bien sûr les Romains. Grâce à la Via Domitia (une route romaine de 780 km qui traversait le sud de la France), les vins de la région voyageaient déjà à travers tout l’Empire romain.
Mais en l’an 92, un empereur romain d’humeur capricieuse décida de protéger les vins italiens en interdisant la production dans la région, alors connue sous le nom de « Narbonnaise », et ordonna… d’arracher les vignes. Rien que ça.

Heureusement, l’Église a repris le flambeau au Moyen Âge : les moines et les abbayes ont perpétué la tradition viticole, faisant du vin un élément essentiel du patrimoine local. En plus de l’anecdote savoureuse sur la Blanquette de Limoux, on dit aussi que le Languedoc est le berceau des vins fortifiés. Cela, on le doit en grande partie à Arnaud de Villeneuve, médecin et théologien à l’Université de Montpellier, qui, vers la fin du XIIIe siècle, aurait perfectionné l’art de fortifier le vin.
Son travail s’est largement inspiré des savoirs médicaux et scientifiques arabes, notamment en matière de distillation, des connaissances venues d’Al-Andalus, transmises par les échanges commerciaux et les traductions. Le résultat ? Une technique à l’origine des fameux Vins Doux Naturels que la région produit encore aujourd’hui, comme le Maury, le Rivesaltes ou le Banyuls.
L’histoire de la scène viticole du Languedoc-Roussillon : une époque peu glorieuse
À partir du XIXe siècle et jusqu’au XXe, le Languedoc a connu une période… disons, un peu moins prestigieuse. La région s’est forgée une réputation de « vin de masse », produite en énormes quantités par de grandes caves coopératives. À un moment donné, on estime que le Languedoc représentait près de 40 % de toute la production viticole française !
Ces caves coopératives, on les croise encore un peu partout. Certaines sont toujours en activité, d’autres sont devenues de jolies ruines pleines de caractère, témoins d’un autre temps. À cette époque, la priorité, c’était la quantité, pas la qualité. Le vin était envoyé par trains entiers pour ravitailler les soldats, tenir les ouvriers du Nord… ou simplement parce qu’on buvait beaucoup plus de vin au quotidien qu’aujourd’hui.
Et comme si ça ne suffisait pas, il y a eu la crise du phylloxéra, ce petit insecte venu d’Amérique qui a ravagé les vignes partout en Europe, puis les grandes révoltes comme celle de 1907, quand les vignerons sont descendus dans la rue contre la chute des prix, les fraudes, et l’arrivée massive de vins algériens bon marché. Bref, une vraie crise d’identité viticole.

Le renouveau du vignoble Languedoc-Roussillon
Les choses ont commencé à changer dans les années 1970 et 1980 avec l’arrivée de l’appellation Vin de Pays d’Oc et la montée en puissance des labels AOC (Appellation d’Origine Contrôlée - aujourd’hui AOP, Appellation d’Origine Protégée). Ces classifications axées sur la qualité ont contribué à faire évoluer l’image de la région, autrefois connue pour ses vins de table en vrac, vers celle d’un véritable acteur du vin de qualité.
Petit fun fact : saviez-vous que l’AOP Fitou, créée en 1948, est la plus ancienne appellation de vin rouge du Languedoc ?
Peu après, d’autres appellations comme Saint-Chinian et Faugères (1982), les Coteaux du Languedoc (1985, devenus AOP Languedoc en 2007) ou encore Pic-Saint-Loup (2017) ont remis la région sur la carte des grands vins français. Et le changement a bel et bien eu lieu : de nombreux domaines ont été repris par une nouvelle génération de vignerons qui misent désormais sur la qualité plutôt que la quantité.
Cette nouvelle vague de producteurs n’a pas peur d’innover : ils travaillent avec des cépages autochtones, redonnent vie à de vieilles parcelles, et explorent des styles alternatifs comme les vins oranges, les PetNats ou les cuvées sans soufre ajouté, tout en respectant et réinventant le patrimoine classique des AOP de la région. Ce n’est pas rien : le Languedoc-Roussillon est tout simplement la plus vaste région viticole du monde, avec plus de 240 000 hectares de vignes. De quoi laisser libre cours à toutes les audaces créatives !
Pas étonnant, donc, que le Languedoc-Roussillon soit aujourd’hui l’une des régions viticoles les plus dynamiques et passionnantes de France.

Et le Roussillon, dans tout ça ?
Malgré cette évolution, le Roussillon n’a jamais vraiment été sous les projecteurs. Éclipsé par son grand frère, il reste un peu dans l’ombre… mais croyez-moi, ses vins méritent qu’on s’y attarde. Je vous en reparlerai très bientôt, alors préparez vos verres !
C'est quoi la suite ?
Voilà donc un petit tour d’horizon express du vignoble du Languedoc-Roussillon et de son incroyable transformation en une scène viticole vivante et dynamique. Maintenant que vous connaissez l’histoire, place à la partie la plus savoureuse : les vins eux-mêmes !
On parlera appellations, cépages, et bouteilles parfaites pour impressionner vos amis amateurs de vin.
Parce qu’après tout, qui n’a pas envie de savourer de bonnes quilles?
Santé ! Ana



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